Les pensées
Comment pensons-nous ?
Petite histoire
"Je marche sur un sentier de montagne. C’est la fin de la journée et un vent léger s’est levé. Je suis tranquillement dans mes pensées lorsqu’un frémissement dans les herbes du chemin attire mon attention. Quelque chose bouge dans les herbes. Intriguée, je m’approche un peu et ai un sursaut en découvrant : un serpent ! Un frisson de peur m’envahit. Je me saisis d’un bâton et avance courageusement en écartant bruyamment les herbes pour le faire partir. Jusqu’au moment où mon bâton soulève une vieille corde effilochée dissimulée dans les herbes. Ce n’était que ça ! Un soulagement immense m’envahit et je me mets à rire. Le vent en agitant les herbes la faisait apparaître dans les ombres du soir. Il n’y a jamais eu de serpent !"
La morale de l’histoire est que l'on se trompe deux fois : - Une première fois en ne reconnaissant pas la corde - Une deuxième fois en la prenant pour un serpent Quel facteur mental a généré cette succession des pensées ? Ce sont les émotions qui leur ont précédées : calme, curiosité, peur, colère, soulagement, joie. Les émotions sont à l’origine des pensées ( se rappeler la chaîne de la prise de conscience : objet des sens - un contact avec un sens - une sensation - puis une émotion qui engendre une pensée). Le phénomène de pensée suit deux mécanismes :
Premier mécanisme : on ne reconnait pas les choses telles qu’elles sont vraiment. On ne reconnait que ce qui est issu de notre mémoire et de nos apprentissages c’est à dire de nos conditionnements. L’émotion nous rappelle un souvenir du passé et le ramène dans l’instant présent avec sa charge “énergétique” et sa signification (le concept qui est stocké avec).
Ce qui amène au deuxième mécanisme : on interprète la réalité en la prenant pour autre chose que ce qu’elle est et cela devient pour nous la vérité. Notre vision du monde est ainsi créé avec des fabrications mentales que l’on a stockées dans notre mémoire. Ces fabrications mentales auxquelles on s’accroche sont aussi appelées des concepts.
Un petit enfant a-t-il peur du feu ? Le feu en tant que phénomène brûlant et destructeur est un concept inconnu de lui. C’est parce qu’il en aura fait l’expérience et que cette expérience sera stockée dans sa mémoire que le feu évoquera un danger potentiel et que ce conditionnement lui fera prendre des précautions.
Ces mécanismes ne sont pas mauvais en soi : c’est comme cela que nous apprenons et que nous nous structurons dans la vie sociale. Mais le monde tel que nous le connaissons, n’est que le fruit de nos émotions.
Qui pense ?
Le phénomène génère une sensation qui engendre une émotion qui rappelle un souvenir lié à la charge émotionnelle. Le souvenir est un élément du passé que l’on a stocké tel qu’on l’a perçu alors (et pas tel qu’il s’est déroulé). Car "le passé n’a jamais existé” … en tout cas, ce que nous prenons pour le passé ne correspond pas à la réalité du présent qui a été vécu. Le souvenir du passé revenu à notre mémoire de l'instant est coloré des circonstances du présent (les souvenirs d’un même événement ne sont jamais les mêmes mais dépendent du moment où on les raconte). Un souvenir est donc conditionné par le moment présent et se transforme dans l’instant présent. On peut en déduire que le le passé n’existe pas : il est relatif au moment présent. Dans le présent, j’ai une représentation du passé. Au moment ou je pense, ma perception est déformée car elle est regardée à travers les yeux du passé. Notre difficulté est de lâcher le passé car sans lui qui est-on ? Nos souvenirs, tout ce qui fait notre identité est lié à nos histoires passées. Sans passé, plus de "moi", de "je". Nous nous accrochons à nos histoires que nous voulons continuer dans le futur. Nous sommes des créateurs : afin de maintenir notre identité nous nous projetons dans le futur pour assurer notre survie.
Le futur n’existe donc pas : il est une finalité rêvée dans la pensée du moment présent pour continuer à exister. Quand nous sommes pris dans nos histoires, nous utilisons un passé qui n’a jamais existé pour nous projeter dans un futur qui n’existera jamais en ratant la seule réalité, celle du présent. Accepter l’instant présent, c'est cultiver la conscience sans s’identifier aux pensées (aux jugements, et aux interprétations). Cela permet de se libérer de la charge émotionnelle liée à la maintenance de notre identité et de trouver la vraie liberté, celle du choix basé sur la vision de la réalité.

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